Affleurer, par l’écriture, à d’autres manières de voir, de sentir, de vivre, c’est la tentative même de ce roman. En voyage de Venise en Orient à bord d’un navire fatigué d’être, un jeune homme part retrouver un géniteur qu’il n’a jamais connu. L’époque : le Moyen Âge tardif et des croisades hors d’haleine. « Toute ressemblance avec notre temps est à imputer à la nature des hommes », nous dit son auteur.
Une langue atmosphérique riche et gonflée d’aspérités qui racle et déborde, danse avec les mots, le rythme, les codes et les références, sait vous attendrir de toute sa poésie dans le même élan, qui vous attrape sans vous lâcher, somptueuse et subtile, folle d’inventivité. Rayas Richa arpente la littérature et ses contours qu’il se plaît à tordre avec la plume ciselée de lyrisme d’un alchimiste-conteur- d’histoires ivre d’une liberté des plus envoûtantes, des plus désarçonnantes. Un brasier de mélancolie fiévreuse qui tourne dans la caboche la dernière page refermée. On s’en délecte et l’on s’y noie avec un plaisir intense!
La prose — toujours aussi inventive, sensuelle et aventureuse, référencée et joueuse – de Rayas Richas fait entendre l’inquiète permanence de nos besoins de sens […] On est frappé par l’immense charme, les excès foutraques et la confiance désespérée de ce projet romanesque-lent. Agréable vraiment de lire un livre qui en fait trop, ne se conforme à aucun canon, ne se laisse prendre à aucune esthétique : son apparent rejet de la modernité, sa réécriture des mythes, la densité des styles en font un objet, un récit, à la fois inédit et familier. On a hâte de découvrir le troisième tome.