Rage

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Vedrana Rudan

Rage

Mêlant la fièvre célinienne à la rumination féroce et impitoyable de Thomas Bernhard, le premier roman de la Croate Verana Rudan est un brûlot de vérités blessantes.

Rage raconte avec les mots les plus crus le quotidien traumatisant des pays de l’ex-Yougoslavie après une décennie de guerres. Personne n’est épargné. Il faut remonter à Céline pour trouver une voix aussi inouïe : satirique, ironique, féroce, grotesque, amère et hystérique. Cette voix, c’est celle de Tonka, femme de la cinquantaine qui passe sa nuit à zapper devant la télé (dont le son est coupé) et qui a décidé de quitter son mari Kiki pour un homme plus jeune, Miki.
Dans sa nuit d’intimité avec l’atrabilaire, Tonka fulmine et tempête. Elle éructe et raille la société entière, l’Amérique, la publicité, la nature passive de la plupart des femmes mariées, les multinationales qui contrôlent le monde, la nature humaine toujours prête au pire. Elle déverse l’humeur noire de son âme à une audience imaginaire et, avec véhémence, entremêle l’histoire de sa vie difficile, l’expérience douloureuse de la guerre avec les liaisons qu’elle et sa meilleure amie entretiennent avec le même homme.
Diatribe inoubliable, Rage est l’expression d’une voix nouvelle dans la littérature européenne. Une voix impitoyable qui dit en creux l’absence cruelle de l’Europe dans des circonstances hautement tragiques et qui dissèque tel un bistouri la société croate.

Personne de nos jours n’écrit aussi férocement que Vedrana Rudan.

Nadia Gasic

Un monologue puissant […] Une gueulante de 200 pages où tout y passe.

Laurence Rémila Technikart, novembre 2005
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Vedrana Rudan Vedrana Rudan

Vedrana Rudan

Journaliste et écrivain croate, Vedrana Rudan est née en 1949 à Opatija (Istrie). Après nombre de petits boulots — livreuse, vendeuse de journaux, vendeuse de glaces, guide touristique, professeur d’alle...

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Ce livre qui déborde d’humour noir…

Alix Geysels Emplumeor

Sulfureux et crépitant premier roman […] Terrible, remuant, le bouillonnant Rage trace le portrait d’une femme qui en a salement bavé dans ces «Balkans sauvages»« jamais il n’y a eu de paix. Et jamais il y en aura ». Une lecture qui vous secoue, vous érafle.

Alexandre Fillon Livres-Hebdo

Diatribe vengeresse, Rage est aussi le reflet d’un désespoir sans borne et la mise en accusation de la passivité de l’Europe face à la guerre. Un livre qui se lit d’une traite et qui vous remue profondément.

Coup de cœur La Librairie du Boulevard, Genève

Je suis toujours surprise par cette petite maison Quidam qui édite des ouvrages originaux. J’aurais dû me méfier avant d’ouvrir ce livre mais curieuse et faisant confiance à sa ligne iconoclaste dont le fil conducteur est la singularité du style, j’y suis allée la fleur au fusil. Ayant pour habitude d’arriver «vierge» dans un ouvrage — seul le titre et l’image de couverture auraient dû m’alerter — quelle gifle ce bouquin ! Un Bardamu féminin ? Non, une Vedrana Rudan. Retenez ce nom, c’est une bombe serbo-croate qui nous crache au visage un rare cri de rage. Jamais encore je n’ai eu l’occasion de lire un tel déferlement de violence grossière et impudique. Est-ce le reflet de la littérature serbo-croate contemporaine ? Qui m’éclaire ? Vite !
Ce livre n’est pas fait pour traîner entre les mains d’âmes sensibles !

Un roman qui ne quitte pas la mémoire
Tonka est une femme en colère, que le conflit serbo-croate a rendu comme elle le dit elle-même à moitié folle, c’est-à-dire surtout dans un état de rage contre la terre entière, contre ses proches, son mari, un peu falot et sans envergure, ses amies, dont sa meilleure, qui est aussi sa rivale sentimentale, son âge, la maladie, l’hypocrisie des relations humaines, les Amerloques et les talibans ! Cette rage nous est restituée à nous, lecteurs-auditeurs qu’elle interpelle directement, en vrac et par associations d’idées, dans des rafales de phrases courtes : il faut la suivre, Tonka, dans ses bifurcations et se exaspérations ! Mais quelle voix ! Celle d’une femme que la violence du monde a rendue violente à son tour, dure, sans concession envers elle-même et envers les autres, qui estime qu’elle a gagné le droit de tout “balancer”, de dire les choses crûment. Tonka n’a pas de “bonnes manières” et ses pensées ne sont ni conformistes ni politiquement correctes. Elle dénonce l’absurdité de l’Histoire et la petitesse humaine, qui n’échappent pas au scalpel de son oeil et à sa lucidité. Elle n’a pas sa pareille pour disséquer les comportements, pointer les faux-semblants et l’insincérité. Tonka a souffert et se bat aussi contre les souvenirs… A la fin du roman, Tonka remet le son de la télé… Et le lecteur extrême-occidental, qui n’a pas connu de guerre sur son sol depuis soixante ans, et n’a accordé qu’une attention distraite et gênée à l’ex-Yougoslavie, se sent quelque peu mal à l’aise (désolé, mais ce roman a une toute autre force que le Pont de Ran-Mositar de Franck Pavloff). On ne peut le lire qu’à petite doses en se ménageant des pauses, mais il ne quitte pas la mémoire.

Les Bibliothèques de Brest

Une femme en colère
Tonka, clouée au lit, regarde la télévision privée de son et s’entretient avec ses fantômes. Ils lui sont familiers, elle leur dit tout ce qui lui passe par la tête et il lui en passe de toutes sortes et de toutes les couleurs. Elle revisite le passé à la lumière du présent, cet après-guerre chaotique et douloureux. Elle en pardonne pas à sa mère, Croate communiste convaincue, de s’être laissé faire un enfant par un camarade du parti, serbe de surcroît. Elle lui en veut de ce père serbe, de son nom serbe, de la pauvreté qu’elle déteste. Elle déteste la guerre et ses conséquences, les cadavres, les viols, la joissance de donner la mort. Elle déteste les Américains qui lancent des bombes à l’uranium et viennent soigner ensuite les cancéreux. Elle déteste les psychothérapeutes et leurs post-traumatimes. Elle déteste les vieux réfugiés qu’elle voit à la télévision. Elle déteste l’histoire, la géographie, elle déteste aussi et surtout ses cinquante ans et cette Croatie peuplée de minettes aguichantes qui semblent la narguer. Cette nuit où elle attend la venue de son jeune amant au petit matin, le passé remonte comme une marée noire : sa première idée de suicide à douze ans, ses avortements, le sous-sol où elle a vécu. Le passé ne se laisse pas oublier, il revient avec ses misères, ses frustrations, ses peurs. Mais Tonka a sa stratégie : la colère. Tonka ne mâche pas ses mots, elle appelle un chat un chat, son langage est sans détour, grossier souvent, imagé toujours mais il sied à merveille à la vulgarité de la guerre, à son cynisme, à sa bêtise. Le livre de Vedrana Rudan est une féroce provocation.

Sophie Chemineau Métro