En attendant la poétesse israélienne devant les portes des arrivées du terminal A de l’aéroport de Berlin Schönefeld, j’ai compris que j’avais fait une erreur en acceptant ce job d’accompagnateur de poètes que m’avait proposé, il y a un mois, Friedrich Griff, agent littéraire chez Griff & Griff (aucun lien). J’avais accepté spontanément ce job d’accompagnateur de poètes attiré par l’idée d’accompagner des poètes et d’être payé pour le faire, mais c’était une erreur depuis le début. Elle ne m’est apparue que peu à peu, au fil des rendez-vous préparatoires avec Friedrich Griff et son assistante Daniela, puis plus clairement il y a deux semaines lors de la première de la série de lectures poétiques, avec la poétesse polonaise que j’avais été chercher à la gare centrale de Berlin. L’erreur est devenue criante il y a deux heures au café au moment où Friedrich Griff et son assistante Daniela m’ont remis dans une pochette plastique les trois cents euros en liquide destinés à la poétesse israélienne que j’attends maintenant devant les portes des arrivées, et qui n’arrive pas, alors que pourtant le vol en provenance de Tel-Aviv est bien notifié comme débarqué sur le tableau au-dessus des portes, à côté des vols en provenance de Stuttgart, Helsinki, Porto, Stockholm, Marrakech et Cracovie.
« Tu n’as rien de plus sûr pour mettre l’argent ? » m’a demandé Friedrich Griff au café quand il a vu le petit sac en toile dans lequel j’allais transporter la pochette plastique avec les trois cents euros en liquide pour la poétesse israélienne, plus le papier que son assistante Daniela m’a fait signer attestant que j’avais bien reçu la somme de trois cents euros en liquide à remettre à son arrivée à la poétesse israélienne, plus celui où la poétesse israélienne devra signer qu’elle a bien reçu les trois cents euros en liquide quand elle arrivera, si elle arrive un jour et si je ne la rate pas. À quoi ça ressemble une poétesse israélienne ? Non, je n’avais rien de plus sûr qu’un petit sac en toile pour transporter les trois cents euros. Mais comme j’ai dit à Friedrich Griff, qui lui aussi à ce moment-là a compris qu’il avait fait une erreur en m’engageant comme accompagnateur de poètes, « je resterai près de mon sac, ne t’inquiète pas. »